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Pauvreté en Tunisie

* la Tunisie, le rapport constate que le taux de pauvreté annoncé, à savoir 15,2% est supérieur plus de cinq fois au taux admis comme seuil, à savoir 3% de la population totale
* En chiffres, 412 milles familles, vivent avec moins de 1450 dinars tunisiens (environ 505 dollars) par an et par personne
* Pour l’Institut national de la statistique (INS), la pauvreté touche désormais 1,7 millions de Tunisiens, dont 300 mille qui vivent sous le seuil de la pauvreté !

Le récent rapport de la Banque Mondiale concernant la pauvreté dans le monde, vient de paraître, au moment où la Tunisie est en pleine campagne de formation d’un gouvernement qui se fait toujours attendre, tant la gestation dure encore, et la naissance a été à maintes reprises reportées.
Le rapport n’a pas retenu l’attention des medias, à savoir le choc que les chiffres et pourcentages, devraient provoquer. Uniquement, des articles «d’information», qui ont annoncé la publication du rapport, avec citation de chiffres et de pourcentages, sans aller plus loin dans l’analyse des faits, et surtout tirer les conséquences.
 
Des chiffres, sans les lettres d’analyse.
«Accélérer la réduction de la pauvreté en Afrique», est le titre du rapport publié par la Banque Mondiale pour l’année 2019, concernant les taux de pauvreté dans le monde, ses causes ainsi que sa définition. Cette définition concerne toute personne vivant avec moins de 3,20 dollars, par jour, dans les pays à faibles et à revenus intermédiaires. Concernant le statut d’extrême pauvreté, il concerne toute personne vivant avec moins 1,90 dollars, par personne et par jour.
L’éradication de l’extrême pauvreté constitue, selon le rapport de la Banque mondiale, un énorme défi malgré la baisse relative et inégale de ses taux par catégories et régions dans un nombre important de pays dans le monde. A lire les chiffres, plus de 1,9 milliards de personnes, soit 26,2% de la population mondiale, vivent avec moins de 3,20 dollars par personne et par jour, et environ 46% de la population mondiale vit avec moins de 5,50 dollars par personne et par jour.
Concernant la Tunisie, le rapport constate que le taux de pauvreté annoncé, à savoir 15,2% est supérieur plus de cinq fois au taux admis comme seuil, à savoir 3% de la population totale. A placer dans son entourage, à savoir la zone de l’Afrique du Nord et Moyen-Orient (MENA), le Yémen, l’Égypte, l’Iraq, la Tunisie, la Jordanie et le Maroc, ces pays se classent parmi les plus pauvres de la région. La Tunisie, d’après le même rapport, arrive sixième dans le classement juste après l’Irak.
 
Vision(s) locale(s)…
Il faut noter qu’une étude visant à dresser une carte multidimensionnelle de la pauvreté en Tunisie et à mesurer l’ampleur de l’impact du phénomène, au niveau de différentes entités sur la base d’une approche statistique en prenant en compte la totalité des variables liées aux indicateurs de développement humain, a été élaborée, l’année dernière, par une unité de recherche spécialisée en économie du développement de l’Institut Supérieur des Sciences Economiques et Commerciales de Tunis.
On peut y lire que près de deux millions de personnes, vivent en dessous du seuil de pauvreté. Une pauvreté qui concerne essentiellement, les régions du nord-ouest, du centre et du sud-ouest, qui seraient les plus touchées par ce phénomène. En chiffres, 412 milles familles, vivent avec moins de 1450 dinars tunisiens (environ 505 dollars) par an et par personne.
Dans cette pauvreté, se distingue la zone du centre-ouest, par une misère plus grande, à savoir une extrême pauvreté qui touche  45% de la population.
Selon l’étude, cette situation est due à deux facteurs essentiels :

  1. La faiblesse des investissements publics dans la santé, l’éducation et autres programmes sociaux.
  2. Les solutions proposées pour remédier au fléau de la pauvreté sont inadaptées et ne peuvent résoudre les causes profondes comme l’inégalité des chances ou la répartition injuste des richesses accumulées et la croissance.

Une crise de vision, de conception, et même de mise en place, des programmes de développement, dans les trois secteurs :

  1. L’infrastructure de base :Ces régions manquent atrocement de routes goudronnées, de pistes agricoles viabilisées, de ponts et autres structures.
  2. La politique sociale :Ces régions sont les plus touchées par la réduction des budgets des secteurs de l’éducation, de la santé et de la culture. Sans oublier le ministère des Affaires sociales, avec la réduction relative de son budget, et la croissance des besoins, n’arrive plus, ni directement, ni à travers ses relais,  à jouer son rôle ancestral de réducteur de la pauvreté.
  3. L’investissement privé :n’a pu jouer le rôle que l’Etat prétend lui octroyer dans ces régions. Rares, et même très rares, sont les projets générateurs de postes d’emploi. L’Etat, à travers ses divers services publics et administrations, restent le premier employeur de ces régions pauvres.

 
Combat de chiffres…
Pour l’Institut national de la statistique (INS), la pauvreté touche désormais 1,7 millions de Tunisiens, dont 300 mille qui vivent sous le seuil de la pauvreté !
La région du nord-ouest est la plus touchée par ce phénomène, avec 28,4%, dont 6,4% qui vivent sous le seuil de la pauvreté. Quant au Grand-Tunis, la pauvreté a affecté 5,3% de la population, dont 0,3% vivant sous le seuil de pauvreté. La Présidence du gouvernement a récusé ces chiffres, les considérants «amplifiés».
Tant en Tunisie, comme ailleurs, les avis divergent et même se contredisent, concernant la pauvreté. Une querelle de méthodologie, qui plonge dans les entrailles des subtilités, mais aussi des «doutes» des uns, que les autres manipulent ces chiffres, l’INS, présente sur son site internet, sa méthodologie, comme suit : «La méthode adoptée ici pour le calcul du seuil de pauvreté consiste à évaluer ce seuil sur la base des besoins en énergie alimentaire. Il s’agit d’estimer le coût d’un panier de biens alimentaires permettant de garantir un apport calorique indispensable à l’activité de l’individu (Besoin Energétique Recommandé BER). L’estimation de ce coût requiert la détermination d’un groupe de référence dont le panier de consommation sera utilisé pour déterminer le coût moyen de la calorie. Ensuite, le coût moyen de la calorie est utilisé pour déterminer la composante alimentaire du seuil de pauvreté. Ayant déterminé cette composante alimentaire, on déterminera par la suite les deux seuils de pauvreté: le seuil bas et le seuil haut», avant d’ajouter qu’«Il n’existe pas une méthode standard pour la fixation de la population de référence», et de préciser que «le choix de la population de référence pour déterminer le panier de consommation est plutôt guidé par le libre-arbitre de l’analyste. Il n’en demeure pas loin que la mesure du seuil de pauvreté est très sensible au choix de la population de référence. Les habitudes de consommation de ce groupe sont décisives dans la détermination de la composition du panier de consommation qui constitue la base du calcul du seuil de pauvreté alimentaire».
Le ministère des Affaires sociales, présente une autre vision, ou plutôt un autre point de vue. Sur son site internet, est publiée une étude élaborée par Yassine Jmal, sous le titre «Mesure de la pauvreté en Tunisie : (Limites et challenges)», reconnaît que «La pauvreté est un phénomène difficilement mesurable», et que «plusieurs définitions ont été élaborées par des économistes, statisticiens et sociologues»… Sans oublier de préciser que «les organisations internationales (essentiellement la Banque Mondiale) ont toujours cherché à harmoniser les concepts et les méthodologies».
Concernant la pauvreté, Jmal, accepte «toutes ces définitions [qui]partent du fait que la pauvreté est une situation de privation matérielle et morale empêchant l’individu de satisfaire ses besoins essentiels», avant de remarquer que «les instances statistiques adoptent une définition monétaire», et de conclure que «la définition monétaire est toujours critiqué par plusieurs intervenants».
 
La solution ???
A la cacophonie des méthodes et surtout des résultats et conclusions, s’ajoute une autre concernant la solution (ou les solutions) à adopter pour dégager le pays de cette fatalité. 
Déjà en octobre 2015, sur le site internet tunisien, «l’économiste maghrébin», de la plume de Hamza Marzouk, on peut lire à ce sujet : «Malgré l’obtention du Prix FAO 2015 (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) pour la lutte contre la pauvreté en juin dernier pour ses efforts dans l’éradication de la pauvreté et la réduction des inégalités sociales, la Tunisie a encore du chemin à faire. D’ailleurs, le ministre des Affaires sociales vient de déclarer récemment que 25% de la population tunisienne sont indigentes et analphabètes et que le pays compte 870.000 familles nécessiteuses, chiffre alarmant comme ceux avancés par l’Institut national des Statistiques (INS) de 2010 qui révèlent que 15,5% des Tunisiens vivent sous le seuil de pauvreté et que 4,6% des Tunisiens vivent sous le seuil de la pauvreté extrême», avant d’ajouter : «Les chiffres parlent d’eux-mêmes et indiquent un grand décalage. Tous ces chiffres viennent d’être accentués par une étude préparée par le Centre des études économiques et sociales de l’Université de Tunis indiquant que le taux de pauvreté, pendant les quatre dernières années, a connu une augmentation de 30%».
Sans la date, ce constat et ces chiffres et pourcentages, avec une certaine marge, restent valables en 2020.

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